Retour au Bataclan pour la seconde partie de cette première finale nationale. Quinze groupes venus défier les onze de la veille, se soumettant au vote du public avant d’être départagés par un jury de professionnels de la musique (musiciens, producteurs, journalistes…) qui, ce soir encore, prendront la parole après chaque prestation pour donner leur ressenti et leurs conseils pour permettre à ces musiciens de progresser.
La finale reprend donc avec Hi Boris, groupe de rock qui n’est pas sans rappeler Skunk Anansie sans doute en raison de la grande assurance au chant de Natalia, dont le timbre est souvent proche de celui de Skin. On ne peut sans doute pas en dire autant du reste du groupe qui doit clairement apprendre à apprivoiser la scène. Les chansons sont là, mais il manque ce travail du live pour se faire un nom.
12 n’est en fait que quatre, trois garçons en chemises blanches et bretelles noires et une fille à la batterie. Trois chants qui s’alternent en parfaite démocratie dans un rock énergique en français et en anglais notamment lors d’une séduisante reprise du « Toxic » de Britney Spears dans l’esprit de celle d’A Static Lullaby. Plus dubitatif lorsqu’ils se mettent à jouer comme Les Forbans ! N’est effectivement pas The Joking (lauréat national 2012) qui veut au pays du rock’n’roll… Dommage ! Malgré tout le groupe possède une bonne série de chansons et une bonne dose d’énergie qui séduisent un public bien plus nombreux que la veille. Une histoire donc à suivre…
Retour au très gros son, avec le hard-rock des Shades (ex-About 6) et son excellent guitariste aux faux airs de Michael Jackson période « Thriller » (il repartira d’ailleurs avec le prix du meilleur guitariste). Très bonne maîtrise technique, un jeu de scène sans doute à retravailler – attention à ne pas faire les 100 pas – mais le set, extrêmement carré, est varié et permet au groupe de réaliser une très bonne prestation.
Respiration avec Brax & Okapi qui après nous avoir appris à reconnaître notre droite de notre gauche… fait profiter au public de la première prestation non rock de la finale, entre hip-hop et culture africaine (Congo). Un enthousiasme communicatif lorsque les filles de cette famille (plus de douze musiciens sur scène), tout sourire, sont mises en avant. L’édition 2013 d’Emergenza prend alors une saveur bien différente. Et Brax d’aller asséner une dernière claque avec un morceau dont l’énergie rock remettra plus d’un groupe du genre à sa place.
Une énergie bien différente avec les lauréats nantais Pal in Jam, venus avec un important contingent de supporters. Songwriting folk rock de qualité et rondement mené, qui fait danser le public très majoritairement originaire de Loire-Atlantique à ce moment du show. Quelques faussetés au niveau du chant et un besoin de maitriser plus la scène. L’ensemble est pour le moment encore assez brouillon en dehors d’un lead très assuré mais n’empêche pas les fans de sauter et sauter encore.
Dur dur pour Turpitudes de passer après ça. En effet, sans être un mauvais groupe, celui-ci est clairement un cran au-dessous des deux précédents, ayant à travailler sur un peu tous les postes individuels et collectifs pour être au niveau. Une finale sans doute un peu prématurée pour eux, mais rien de tel qu’une telle expérience pour acquérir de la maturité qu'ils ont déjà commencé à mettre à profit. Notons, malgré tout, leur sincérité ainsi que la présence de leur chanteuse, saluée par le jury.
Rock alternatif et heavy au programme (politique) de Gorgone. Un quatuor de quadra costauds dont les morceaux en français laissent entrevoir comme une envie d’en découdre. Malheureusement la composition semble souvent inachevée ou contrenature, comme sur ce « Monsieur P. » dont le couplet très punchy fait espérer le meilleur et s’acoquine malheureusement à un refrain que l’on dirait tiré d’une autre chanson… Le résultat peine à séduire.
Vague de fraicheur avec la soul des semble-t-il très jeunes What Eve Wishes. Une chanteuse, toute en rouge, au charme et au potentiel certain, mais dont la justesse n’est pas malheureusement toujours au rendez-vous. Dommage car le reste du groupe, tout en sobriété, est clairement au niveau de ce set dont les reprises se confondent avec les compositions dans un style fidèle à la fin des années 1950.
Puis vient le hip-hop mutant d’Elecrack (contraction d’electro-rap-rock) dont nous avons déjà parlé dans ces colonnes (lire l’article). Grosse section rythmique (Marco repart d’ailleurs avec le prix du meilleur bassiste) renforcée par les touches sonores ajoutées par le DJ qui apporte une assise musicale puissante sur laquelle peut se poser le flow de Noar, une dégaine type Teki Latex (TTC) et un timbre nonchalant qui rappelle parfois celui de Kool Shen. L’univers est en place, l’énergie au rendez-vous, mais il manque un peu d’interaction entre les membres pour mettre le groupe dans la cours des grands.
Ambiance caribéenne avec Ocean Kompa, groupe de… kompa. Trois voix, un bon niveau d’instruments et une invitation à un voyage vers Haïti mais aussi, plus étrange, au pays de la soul. Malheureusement on reste perdu sur l’Île-de-France, pas suffisamment dépaysé musicalement. On aimerait se sentir un peu plus dedans, les musiciens également… on reste malheureusement avec son passeport à la frontière.
Il est toujours amusant de voir un jeune groupe pratiquer une musique qui n’est pas vraiment de sa génération ou pas très en vogue dans son pays. C’est le cas des Lift Up qui, du haut de leurs vingt ans, proposent un rock un peu bluesy, avec des touches funky, qui n’auraient sans aucun doute de mal à marcher outre-Atlantique. L’aventure sera sans doute plus compliquée ici, pourtant le niveau est excellent et la reprise du « Roxane » de Police s’intègre parfaitement à leur univers. Ajoutez à cela un leader charismatique et il ne reste plus qu’à croiser les doigts pour que la chance leur sourie ici aussi.
Retour à un rock plus actuel avec Citizen dont le lead, là encore, est tenu avec assurance par Hugo de Choisy. Malheureusement on n’a pas l’impression de voir un groupe sur scène malgré des chansons qui ne demandent qu’à être mise en valeur. Un deuxième guitariste encore un peu timide qui se laisse entraîner par un bassiste incapable de tenir en place et qui se balade en touriste, lunettes de soleil vissées sur le nez. Ah oui, un dernier conseil aux groupes de manière plus générale : « Ne reprenez pas Muse si vous n’avez pas le niveau vocal de Matthew Bellamy »…
Originaire de Saint-Lô, Amnezia a remporté la finale bretonne qui se déroulait à Rennes le 14 juin dernier et grâce à laquelle ils ont pu présenter ce soir leur hard-rock matiné de blues au public parisien. Une bassiste sexy, un guitariste en provenance direct de la fin des 70’s et une vraie cohésion sur scène, ce qui aura souvent fait défaut ce soir à pas mal de formations. Un très bon niveau technique et une certaine sensualité poisseuse dans des lignes de guitares assez hypnotiques. Un chant qui mériterait peut-être à être un peu plus varié mais le résultat est à la hauteur.
Seven Ages ouvre son set avec une chanson à la redoutable efficacité, dans une ligne pop rock aux accents indé très bien sentis. Un chanteur dont le timbre n’est pas sans rappeler un certain Brian Molko en moins maniéré et le set de continuer sur un rythme soutenu, enchaînant sur une jolie série de titres qu’il faudrait peut-être agencer différemment pour ne pas épuiser le mieux d’abord… Le groupe maîtrise en tout cas son sujet et pourrait bien à force d’expérience marquer de son empreinte la scène parisienne.
Pour finir, le groupe Nemesis qui est assez représentatif de ce retour du rock dans une frange plutôt dure que l’on a pu observer lors de cette finale Emergenza. Une chanteuse très correcte mais dont le potentiel vocal demande encore à être travaillé. Un groupe qui connaît ses gammes mais qui gagnerait à jouer un peu plus ensemble. Nemesis est ce qu’on peut qualifier de groupe en devenir, et donc encore trop jeune pour faire son trou dans cette finale.
Une soirée riche avec quelques groupes de qualité mais sans pour autant que l’un d’eux ne se démarque vraiment et frappe les esprits. Voici donc les résultats :
Classement général
1. Obsolete Radio
2. Brax & Okapi
3. Elecrack
4. Lift up
5. More thank Monkeyz
6. Shades
7. Raspy Junker
Meilleur guitariste
1. Shades
2. Lift up
Meilleur bassiste
1. Elecrack
2. Gorgone
Meilleur batteur
1. More than Monkeys
2. Buzz on the rocks
Meilleur chanteur
1. Lift Up
2. Brax & Okapi
Meilleur show
1. Raspy Junker
2. Obsolete radio
Meilleurs arrangements
1. Brax & Okapi
2. Nektar